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LA FIN DU VOYAGE

Publié le par Marie célanie

LA FIN DU VOYAGE

Ils se dirigèrent prudemment vers la ville qu'ils avaient repérée.

Un vallonnement de collines aux formes doucement arrondies l'enserrait, s'ouvrant vers l'ouest. Là, la rivière qui l'arrosait, s'élargissait vers une plaine fertile.

En quittant leur vaisseau, ils avaient envoyé vers la Terre ce qui serait sans doute leur dernier message. "Terra 2 trouvée. Avons atterri. Partons en reconnaissance"

Ils ne savaient pas si quelqu'un les attendait encore, leurs messages! Leur mission avait duré si longtemps! En l'acceptant, ils savaient que c'était un voyage sans retour. Ils partaient à la recherche d'une planète ayant les mêmes caractéristiques que la Terre. Ils partaient au fin fond de l'espace, mais ils n'auraient pas les moyens de revenir. Ils passeraient la plus grande partie du temps en hibernation, leur métabolisme ralenti, pour ne pas vieillir trop vite. Le vaisseau les réveillait régulièrement et ils transmettaient à la Terre les résultats de leur Quête. mais depuis longtemps, leurs messages restaient sans réponse.

Ils avaient visité plusieurs planètes ressemblant un peu et parfois beaucoup à la Terre. mais aucune ne permettait à l'homme d'y vivre.

jusqu'a ce que Terra 2 apparaisse.

Elle appartenait à un système solaire de plusieurs planètes, ils en avaient compté 5, qui tournaient autour d'une étoile. Terra 2 tournait aussi sur elle-même promesse d'une alternance de jours et de nuits. Ils avaient placé le vaisseau en orbite et scruté avidement le globe inconnu. Il y avait une atmosphère, au moins 2 océans et des terres émergées d'une superficie moyenne.

Ils avaient fini par découvrir une ville, ce qui laissait espérer que la planète était habitée. S'il n'y en n'avait apparemment pas d'autres, c'est que les habitants n'étaient pas très nombreux et sans doute nomades. Rien ne laissait deviner une technologie avancée.

Ils se posèrent dans un désert proche et entamèrent leur exploration.

Très vite, ils trouvèrent une route de terre battue, bien entretenue et bordée d'arbres, qu'ils empruntèrent. Tous les capteurs de leurs scaphandres indiquaient une atmosphère compatible. Ils devraient pouvoir respirer sans protection; néanmoins, par prudence, ils gardaient leurs équipements, pour le moment. La température extérieure était agréable, une légère brise soufflait, agitant les feuilles des arbres. Le ciel était bleu, sans nuages.

Ils arrivèrent aux premières maisons, basses, agrémentées de jardins, potagers, semblait-il. Les portes et les fenêtres auraient convenu à des terriens par leur taille et leurs proportions, la route se transformait en rue, bordée de maisons dont la hauteur augmentait à mesure qu'ils approchaient du centre. Les maisons semblaient plus anciennes, aussi, moins simples. Cependant, ils ne rencontrèrent personne. La ville était vide. Où étaient passé les habitants? On aurait dit qu'ils venaient de partir à l'instant, mais sans laisser de traces.

Pas de traces de pas, ni de roues, pas de déchets par terre. Des rues, des places, des édifices, tous vides.

Ils explorèrent la ville en tous sens, troublés par une ressemblance frappante avec le monde d'où ils venaient.

La nuit venant, ils retournèrent au vaisseau.

Au matin, ils se remirent en route, mais décidèrent de ne plus utiliser leurs combinaisons. Ils emportèrent leurs armes, par prudence.

Ils respirèrent à pleins poumons un air frais , mais curieusement sans odeurs. La ville n'avait pas changé, elle était telle qu'ils l'avaient laissée. Vide.

Ils décidèrent de pénétrer dans les édifices au hasard et commencèrent par une petite maison construite au bord de la rue avec un jardin à l'arrière, comme ses voisines. Ils n'eurent aucune difficulté à pousser la porte qui s'ouvrit sans un bruit. Ils suivirent un couloir sur lequel s'ouvraient d'autres portes.

La première était sans doute une pièce de réception et se meublait de sièges confortables et de petites tables, des sortes de buffets s'adossaient aux murs peints en blanc.

En face s'ouvrait ce qui devait être la cuisine, on y trouvait une vasque d'évier avec ce une sorte de robinet. Ils le tournèrent dans tous les sens avant de voir couler de l'eau. Il y avait donc l'eau courante! Extraordinaire. Les autres pièces étaient des chambres et contenaient toutes un couchage simple, un siège ou deux et une armoire.

Il n'y avait rien de personnel, pas de décorations aux murs, tout semblait être uniquement fonctionnel.

Ils continuèrent leurs recherches, mais à quelques variantes près, toutes les maisons se ressemblaient.

Vers le centre, ils trouvèrent de nombreuses boutiques, en tout cas, cela y ressemblait. il y avait un lieu de présentation des marchandises, un comptoir, des rayons remplis et une arrière boutique. Ils trouvèrent ainsi, de curieux vêtements, amples et confortables, tous blancs, confectionnés dans une étoffe ressemblant au coton. Quand ils les essayèrent, ils s'y trouvèrent tellement à l'aise, qu'ils décidèrent de les adopter, plus tard, s'ils s'installaient.

Vers le milieu du jour, ils eurent faim. Ils s'installèrent sur une place, sous un arbre qui ressemblait à un chêne, dispensant une ombre généreuse. Ils n'étaient plus qu'une vingtaine. La quête avait été longue et éprouvante. Certains ne s'étaient jamais réveillés dans leurs caissons d'hibernation, certains avaient vieilli plus vite et s'étaient éteints, certains avaient perdu la vie pendant les missions d'exploration. Ils n'étaient donc plus qu'un petit groupe d'hommes et de femmes, fatigués, éprouvés.

Et, assis sous cet arbre, dans cette atmosphère calme, ils se sentaient bien. Ils grignotaient les dernières rations du vaisseau et se regardaient. La décision semblait évidente, ils allaient rester ici. Tous ensemble.

ils s'installèrent. Ils choisirent leurs maisons, parfois à plusieurs, parfois seuls; comme il leur plaisait.

Leur vie s'organisa simplement. Ils formaient déjà une communauté autour du Commandant du vaisseau et ils gardèrent ce fonctionnement.

Les jardins leur donnaient en abondance des fruits et des légumes. Dans les boutiques, ils trouvèrent des réserves de matière grasse, de farine et même de la viande et du poisson séchés.

Les maisons avaient un peu changé. Elles n'étaient plus toutes identiques. Leur ameublement variait subtilement.

Ils ne s'étonnaient pas de voir leurs vœux se réaliser, comme par magie. Il suffisait qu'ils ressentent un manque, pour qu'il soit rapidement comblé.

Ainsi pour la viande. Au début, il n'y en n'avait nulle part. Il suffit qu'ils en aient ressenti la nostalgie, pour qu'ils en trouvent dans les boutiques quelques jours plus tard. Ou un peu de variété dans les couleurs et l'aménagement des maisons, et les couleurs avaient progressivement fait leur apparition dans le linge qu'ils trouvaient dans les armoires.

Ils se réunissaient régulièrement sous leur chêne. Ils n'avaient pas grand-chose à faire à part vivre et ils le faisaient, dans un bien-être confortable et harmonieux.

Un jour, comme tant d'autres, ils éprouvèrent tous un besoin impératif de se rendre sous le chêne. Ils formèrent un cercle autour de l'arbre, qui était toujours aussi beau et accueillant, dans leurs vêtements blancs, se tenant par la main. L'un d'entre eux s'avança et s'allongea sous le chêne, comme répondant à un appel. Il s'allongea, entouré de tous ses compagnons, ferma les yeux et disparut. Ils restèrent un moment, formant toujours ce cercle, puis ils rentrèrent chez eux. En silence.

Ce fut le premier à partir. Ils furent appelés, les uns après les autres suivant ce même rituel, qu'ils ne pensaient même pas à contester. C'était ainsi. Leur nombre diminuait, le cercle, rapetissait.

Bientôt, il ne resta que le Commandant. Seul. Il alla s'allonger sous le chêne. un instant, il eut l'impression furtive de voir tous ses compagnons réunis pour l'accueillir...puis il disparut. Comme les autres.

L'Entité-Planète était satisfaite. En un instant elle fit disparaître de sa surface toute l'illusion qu'elle avait maintenue, puisant dans les mémoires de chacun les éléments nécessaires à la fabrication d'un environnement aimable. Elle s'attachait à satisfaire les moindres désirs matériels liés aux souvenirs de leur vie terrienne. L'illusion était parfaite.

Et ils étaient heureux, le temps qu'il fallait. Ensuite elle les accueillait , avec les autres.

Et elle reprenait son attente. Elle attendait les vaisseaux qui erraient dans l'univers à la recherche d'un autre monde, elle les attirait, leur procurant les images qu'ils souhaitaient voir pour finir enfin leur voyage et elle les accompagnait jusqu'à la fin, qu'elle leur faisait paisible et heureuse.

Telle était sa raison d'être: l'Entité-Planète était la fin du voyage.

©Marie Célanie

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M
Une tentation de divinité?
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